• Le Manteau magique


    CONTES

     

    Yang Lu Chan (fondateur du style Yang), après une visite qui s'était prolongée tard dans la nuit, regagnait sa demeure. Comme il était en train de traverser l'un des quartiers les plus famés de Pékin, il marchait à grands pas, espérant ne pas faire de fâcheuse rencontre...

    Et justement...une désagréable surprise l'attendait: au coin d'une rue, il se trouva nez à nez avec un groupe de voyous qui lui barraient le passage. Se retournant pour prendre la fuite, il constata amèrement que ses arrières étaient coupés par le reste de la bande. Une trentaine de malfrats, armés de bâtons et de matraques, l'encerclaient. Yang Lu Chan n'essaya même pas de résister, il se laissa dépouiller de sa bourse sans dire un mot et, quand les coups commencèrent à pleuvoir, il s'enroula dans son manteau, ressemblant à un sac d'entraînement. Les agresseurs furent vite lassés de frapper ce corps inanimé et croyant qu'il avait eu son compte, ils ne tardèrent pas à l'abandonner.

    Le lendemain, Yang Lu Chan trottinait dans les rues et se livrait à ses activités quotidiennes comme si rien ne s'était passé. En tout cas, il ne portait sur lui aucune trace des coups qu'il avait essuyés la nuit précédente... Mais le plus surprenant dans cette histoire c'est que plusieurs de ses agresseurs avaient, eux, dû rester au lit!

    Ceux qui avaient directement touché le manteau de Yang gardèrent leurs membres paralysés pendant quelques jours.

    Yang Lu Chan(1799-1872) était, en fait, le plus célèbre Maître de Taï Chi Chuan de son temps. Bien que défié de nombreuses fois, il ne fut jamais vaincu. Il semble donc que dans cette embuscade nocturne, afin d ne pas risquer de tuer l'un de ses agresseurs, Yang ait choisi d'amortir les coups avec son "manteau magique".

    En Chine, on dit que de tels Maîtres ont atteint un niveau ou leur chi (Qi), leur énergie interne, est si puissant que leur corps devient invulnérable, souple comme du coton, insaisissable. Mais par contre, quand ils vous touchent, vous ressentez la force d'une montagne, vous êtes paralysés comme si vous aviez reçu une décharge de courant à haute tension.



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    Le Maître des Trois pics



    CONTES et LEGENDES

     

     

     

     Chan San Fong, (Zhang San Feng), le Maître des Trois pics, avait une haute stature, un corps élancé et une constitution robuste qui lui donnaient un air redoutable. Son visage, à la fois rond et carré, était orné d'une barbe hérissée comme une forêt de hallebardes. Un chignon épais trônait au sommet de son crâne. Si son allure était impressionnante, son regard exprimait cependant une douce tranquillité, avec une lueur de bonté.

    Il portait été comme hiver la même tunique fabriquée dans une seule pièce de bambous tressés et il tenait le plus souvent un chasse-mouches fait d'une crinière de cheval.

    Assoiffé de connaissances, il passa la plus grande partie de sa vie à pérégriner sur les pentes des monts Sen-Tchouan, Chansi et Houe-Pe. Il visita ainsi les hauts lieux du Taoïsme, allant d'un monastère à l'autre, séjournant dans des sanctuaires et des temples que les pentes escarpées de la montagne rendaient difficilement accessibles. Il fut très tôt initié par les Maîtres Taoïstes à la pratique de la méditation. Partout où il passait il étudiait les livres sacrés et il interrogait sans relâche sur les mystères de l'Univers.

    Un jour, alors qu'il méditait déjà en silence depuis des heures, il entendit un chant merveilleux, surnaturel...

    Observant autour de lui, il aperçut sur la branche d'un arbre un oiseau qui fixait attentivement le sol. Au pied de l'arbre, un serpent dressait sa tête vers le ciel. Les regards de l'oiseau et du reptile se rencontraient, s'affrontaient... Soudain, l'oiseau fondit sur le serpent en poussant des cris perçants et entreprit de l'attaquer avec de furieux coups de patte et de bec. Le serpent, ondulant et fluide, esquiva habilement les violentes attaques de son agresseur. Ce dernier, épuisé par ses efforts inefficaces, regagna sa branche pour reprendre des forces. Puis, il repartit à l'assaut. Le serpent continua sa danse circulaire qui se mua peu à peu en une spirale d'énergie tourbillonnante, insaisissable.

    La légende nous dit que Chan San Fong s'inspira de cette vision pour fonder le Wu-Tang-Pai, le style de "la main souple" qui façonné par des générations de Taoïstes, devint le Taï Chi Chuan.

    C'est pourquoi les mouvements du Taï Chi Chuan n'ont ni début ni fin. Ils se déroulent souplement comme le fil de soie d'un cocon et ils s'écoulent sans interruption comme les eaux du Yang-Tsé.



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